L'actus
du Pro Bono
Samuel TUAL, Président du MEDEF Pays de la Loire : "nous pouvons inciter plus les entreprises à contribuer au bien commun"
Engagement citoyen et solidarité dans les Pays de la Loire : entretien avec Samuel TUAL, Président du MEDEF Pays de la Loire.
Manon Philippe
15 oct. 2020
Dans le cadre de son étude territoriale « Comment les entreprises s’engagent-elles en faveur du territoire des Pays de la Loire ? », dont les résultats ont été publiés en mai dernier, Pro Bono Lab a souhaité mettre en lumière les points de vue et les engagements de certains acteurs de l’écosystème ligérien, avec un regard spécifique posé sur la crise sanitaire, sociale et économique du COVID-19. Aujourd’hui, Samuel Tual, Président du MEDEF Pays de la Loire, nous livre sa vision dans ce contexte inédit.
Comment la crise questionne-t-elle les liens avec les structures de l’ESS sur le court terme mais aussi au-delà ? A-t-elle amené pour vous de nouvelles formes de collaborations ? De nouvelles démarches solidaires ?
Effectivement, il y a eu 3 temps dans cette crise : il y a eu l’avant, il y a le pendant et puis il va y avoir l’après.
Avant, l’enjeu de la solidarité et d’intervention auprès de ceux qui étaient les plus vulnérables était réel et existait déjà, mais les choses étaient plutôt établies. Il y avait certes des oubliés, mais les entreprises fonctionnaient dans un schéma de croissance et globalement le niveau de l’emploi était assez soutenu. Effectivement elles avaient les moyens d‘investir pour préparer l’avenir d’un côté et redistribuer de l’autre. Cette redistribution se faisant avec la notion d’implication et d’engagement auprès de causes qui leur semblent justes.
Puis, il y a eu l’arrêt brutal de l’activité avec cette crise qui a, de fait, tout paralysé. L’aspect sanitaire que nous avons tous subi, a été dramatique, mais de cette séquence sont ressorties de belles choses qui peuvent être en lien avec l’anthropologie de la région et les valeurs que nous connaissons bien. La solidarité s’est exprimée pleinement dans cette période difficile et nous avons vu les uns les autres se mettre en mouvement. Des démarches ont été faites pour venir en aide à ceux qui étaient sur le front, intervenir dans le domaine du service ou encore venir en aide aux personnes isolées.
Je pense qu’au-delà de la prise de conscience que nous avons évidemment tous eue sur notre vulnérabilité, nous avons pu voir que notre économie était elle aussi vulnérable. Des entreprises se portaient très bien et se sont retrouvées du jour au lendemain, bloquées, arrêtées et dépendantes de l’Etat. Le pays tout entier et ses citoyens en subissent les conséquences. C’était un scénario inimaginable deux mois auparavant.
Cette crise a donc permis à un grand nombre de concitoyens d’avoir un regard nouveau, intériorisé d’abord puis tourné vers l’autre après, qui je pense va engendrer d’importantes mutations dans les comportements à venir.
Un autre point important qui m’a profondément marqué, ce sont toutes ces personnes qui n’étaient auparavant pas ou peu visibles et considérées. Ces personnes qui réalisaient une activité de service de première nécessité pour la population ont été mises en avant et saluées pour leur courage et leur travail et j’espère que cela va rester durablement.
Puis il y a l’après. Il y avait une faible croissance lorsque nous sommes entrés dans la crise et nous allons en sortir avec une forte dépression. Cette situation va être évidemment très difficile à surmonter et la sortie de crise va nécessairement prendre du temps. Ceux qui étaient fragiles avant vont se retrouver en plus grande difficulté et ceux qui ne l’étaient pas vont pouvoir le devenir.
La raison d’être du MEDEF, c’est d’agir pour une croissance responsable. Nous ne nous intéressons pas uniquement à l’économie ou uniquement au social. C’est l’économie qui est sociale, qui est solidaire et qui devra être environnementale, c’est le « et » que nous aimons pratiquer. Il y aura des mesures à prendre pour que nous puissions, avec l’apprentissage de la crise, devenir un peu moins dépendants de la mondialisation et permettre aux entreprises d’investir dans une démarche de soutien à des causes qui contribuent à servir le bien commun. C’est là qu’il peut y avoir des postures politiques différentes. Certains diront qu’il faut absolument taxer plus pour pouvoir redistribuer. En réalité, appauvrir les plus riches n’a jamais enrichi les plus pauvres ! Je fais partie de ceux qui disent que nous pouvons inciter plus les entreprises à contribuer au bien commun. De façon assez native et en tant que Président d’entreprise, j’ai toujours considéré que nous devions nous intéresser à notre mission première, mais aussi aux impacts que nous pouvons avoir sur le territoire et sur la société.
C’est peut-être utopiste de dire cela mais le monde d’après peut être mieux que le monde d’avant. Il y aura des rendez-vous à ne pas manquer pour travailler ensemble, poser les choses de façon adaptée et ajustée pour une plus grande efficacité sur les sujets que nous venons d’évoquer.
C’est aussi ce que nous a apporté cette période de crise, nous avons été dans l’obligation de communiquer avec des circuits plus courts et avec des personnalités représentantes de l’État, de la Région et différentes institutions, mais aussi avec les organisations sociales. C’est la raison pour laquelle, une des premières actions que nous avons mise en place est la création d’une conférence sociale, et je suis fier de l’avoir portée au niveau de la Région. Nous serons la deuxième région en France à mettre en place ce type de conférence. L’objet sera évidemment d’aborder des sujets très pratico-pratique s pour favoriser la sortie de confinement et la reprise d’activité de façon concertée et l’une des 4 thématiques portera exclusivement sur les publics les plus touchés par la crise. Les acteurs de l’ESS de la Région y sont bien entendu associés.
Ce sera donc une instance très importante pour la Région, un lieu de dialogue et d’échanges qui permettra aussi de définir des arbitrages et des priorités. Ce dialogue se fera avec les partenaires sociaux (organisations patronales et organisations syndicales) sous la caution de l’État et de la Région, de mon point de vue, nous aurons donc un organe puissant pour prendre les décisions. Je suis très fier de pouvoir ré afficher au niveau de la Région et de l’ensemble du patronat régional qui s’inscrit dans une démarche responsable sur les questions qu’ils défendent, que je suis parfaitement aligné avec leur position.