L'actus
du Pro Bono
Les jeunes et l’engagement : pourquoi le programme Explorers coche toutes les cases
L’étude “La France Bénévole : évolutions et perspectives” menée par Recherches & Solidarités en mai 2022 permet de dresser un premier état des lieux du bénévolat et de la vie associative après deux ans de pandémie.
Manon Philippe
18 oct. 2022
Cette recherche observe avec précision l’évolution du bénévolat, des bénévoles et de leurs formes d’engagement. Des informations précieuses que nous avons souhaité mettre en lumière au regard d’un de nos programmes d’engagement : Pro Bono Explorers.
Pro Bono Explorers, késako ?
Pro Bono Explorers (plus simplement appelé « Explorers), c’est un programme national qui vise à faire du bénévolat de compétences un levier d’insertion sociale et professionnelle pour les jeunes. Pendant 2 à 3 semaines, des promotions de 10 jeunes en réinsertion de 16 à 25 ans embarquent pour un parcours en trois phases : une première phase de sensibilisation et d’immersion dans le milieu associatif ; une seconde d’engagement en bénévolat auprès d’une association ; une troisième focalisée sur les compétences, leur identification et leur valorisation après une expérience de bénévolat. Comment toucher ces jeunes ? Nous travaillons avec des structures locales qui les accompagnent comme les missions locales, l’Ecole de la deuxième chance, Article 1…
Plus de 25 promotions ont été, sont ou seront menées en 2022 en Hauts-de-France, Ile-de-France, Auvergne-Rhône-Alpes, Nouvelle Aquitaine et Provence-Alpes Côte d’Azur.
Une fracture associative inquiétante
L’étude de Recherches et Solidarités se fait écho d’un constat plutôt alarmant sur la fracture associative. La corrélation entre niveau de diplôme et engagement associatif est criante. « Si environ 45% des Français.es adhèrent à une association, sans véritable évolution depuis des décennies, la proportion varie plus que du simple au double selon que l’on ne possède aucun diplôme (22%) ou que l’on est titulaire d’un diplôme d’enseignement supérieur (56%). Cette « fracture associative » se prolonge dans le bénévolat, ils sont seulement 15%, en 2022, parmi les titulaires des formations les plus modestes, contre 27% parmi les plus diplômés. » Les raisons sont multiples mais il semble que « les plus modestes, assez hésitants et craignant de ne pas être à l’aise, sont proportionnellement bien moins nombreux à s’inscrire dans une association ».
En ciblant des jeunes en insertion, le programme Pro Bono Explorers va à l’encontre de cette tendance et vient réduire la fracture qui existe au sein de l’engagement. Il permet à des jeunes qui n’ont pas confiance en leurs compétences de les vivre de manière concrète et d’en développer de nouvelles en opérant une mission de bénévolat. Dresser le bilan leur donne l’occasion de prendre conscience et de nommer ces compétences.
Engager ces jeunes éloignés du bénévolat, c’est aussi contribuer à apporter des bénévoles plus enclins à accorder du temps aux associations : « lorsqu’une personne de formation modeste adhère à une association, elle évolue vers le bénévolat dans près de 70% des cas. En prenant le même ratio pour les personnes les plus diplômées, on parvient à une évolution vers le bénévolat de 48% des adhérents. » Une réponse intéressante à donner à la crise du bénévolat et de l’engagement actuelle.
Sans parler bien sûr, du cercle vertueux que peut engendrer la pratique associative pour les plus modestes ainsi que de leur épanouissement personnel.
Un parcours en adéquation avec les motivations des bénévoles
L’étude fait état d’une évolution des sources de motivations des jeunes à s’engager. La notion de citoyenneté, fondement de l’engagement, arrive toujours en tête (49%). Mais au cœur de l’épanouissement personnel des bénévoles, deux thèmes connaissent une forte progression : l’action et l’utilité sociale occupent désormais une place importante dans l’esprit des jeunes. Les jeunes de plus de 25 ans et de moins de 35 ans se distinguent en étant proportionnellement plus nombreux à vouloir s’engager pour être utile, défendre une cause, s’épanouir, acquérir des compétences, exercer une responsabilité, valoriser leur engagement et bénéficier d’une certaine reconnaissance sociale.
« Pro Bono Explorers s’inscrit dans cette dynamique où les jeunes vont à la rencontre d’associations et sont mis en action au service d’un besoin d’intérêt général. En cela le programme semble répondre aux principales préoccupations et motivations des jeunes » témoigne Claire Operto, responsable du déploiement du programme.
“La formule prend bien, elle plait. Pro Bono Lab a vu juste et a su être réactif car on sait qu’il y a un vrai besoin en tant qu’accompagnateur, il est nécessaire d’inculquer ces valeurs très tôt. Ça fait en tout cas partie du package culturel et éducatif qu’on essaie de proposer aux jeunes car ça ne leur est apporté ni par l’école, ni par la famille bien souvent.” estime Fatima Saadan, directrice générale de l’association Eiapic.
Les jeunes et l’expérience du bénévolat
L’étude menée par Recherches & Solidarités met en exergue trois principales sources de satisfaction chez les jeunes dans l’activité bénévole. Le fait d’être au contact avec les autres, et d’échanger avec eux contribue à hauteur de 72% à la satisfaction des bénévoles, être en action et utile à 64%. Enfin, l’épanouissement personnel participe à 33% de leur satisfaction, en particulier pour les moins de 25 ans, ainsi que la découverte d’un nouvel univers (25%).
« L’échange et le contact, les méthodes d’intelligence collective sont au cœur du programme Explorer que nous animons » confirme Claire.
La première phase de sensibilisation est justement dédiée à la découverte et à la familiarisation d’un nouvel univers : celui de l’ESS et du monde associatif. “Le programme Pro Bono Explorers nous a aidés à nous projeter dans le monde associatif. Il nous a sensibilisé au bénévolat et ça m’a fait du bien” témoigne Rayan-Moussa, jeune qui a participé à une promotion de Pro Bono Explorers Jeunes en 2021.
Les volontaires sont ensuite invités à répondre à un vrai besoin et à accompagner une association en pro bono, en utilisant leurs compétences. Ils sont immédiatement mis en action, ce sont eux qui réalisent les livrables à destination des associations.
« J’ai pu réaliser une affiche pour une collecte de Noël et j’ai découvert un nouveau logiciel pour faire des cartes. Ce qui m’a beaucoup plu, ce sont les échanges d’idées et une bonne complicité. Je me suis sentie utile ! » - Nafahti, une autre jeune participant au programme Explorer.
Enfin, l’épanouissement personnel est pris en compte dans la dernière phase du programme avec un temps d’échange, d’évaluation et de valorisation des compétences des jeunes.
Davina, a de son côté pris part à la promotion Explorer Citizen Campus et nous confie : “Grâce à cette expérience, je me suis découverte des compétences en pédagogie et en travail en équipe. En réfléchissant au rôle d’Ambassadrice puis en le testant, ça m’a aussi permis de développer mon sens des responsabilités. Je pense que c’est un atout pour moi, une valeur ajoutée pour mon parcours. Car je n’ai aucune expérience professionnelle et j’avais un peu honte de mon CV vide. Mais aujourd’hui, je sais que je veux y intégrer ces expériences et que ça sera plus facile pour moi d’illustrer mes compétences”
Alors que l’engagement dans le bénévolat accuse une perte inédite de 15% depuis trois ans, la proportion des moins de 35 ans est celle qui proportionnellement s’est le moins désengagée, d’après l’étude Recherches & Solidarités. Les jeunes engagés en association étaient de l’ordre de 20% entre 2013 et 2019 contre 19% actuellement. Les jeunes, remède à la crise du bénévolat ?
Source : Etude "La France Bénévole : évolutions et perspectives" Recherches & solidarités, mai 2022