L'actus
du Pro Bono
Compétences tech & pro bono au Club de Prospective
Le jeudi 10 octobre dernier avait lieu un nouveau temps fort du Club de prospective de Pro Bono Lab. C’est sous le format d’un Probono Lunch autour des compétences tech et du pro bono qu’a échangé la communauté du Club.
Manon Philippe
24 juin 2020
Le jeudi 10 octobre dernier avait lieu un nouveau temps fort du Club de prospective de Pro Bono Lab. C’est sous le format d’un Probono Lunch autour des compétences tech et du pro bono qu’a échangé la communauté du Club.
Accueillies chez l’un des Membres du Club, AG2R LA MONDIALE, étaient présentes la Fondation Bouygues Telecom, la Fondation Deloitte, la Fondation la France s’engage, la Fondation Nexity, la Fondation PwC, la Fondation la Société Générale, la Fondation Thalès, la Fondation Devoteam, la Fondation Cornerstone on demand et SAP France.
Les Membres et invités se sont interrogés sur les meilleures manières d’engager les compétences tech au service de l’intérêt général, dans un contexte où ces compétences restent rares, diverses et extrêmement évolutives. Comment faire du pro bono un levier efficace de transfert de ces compétences. Pour en parler, deux grand.es témoins, expert.es sur la question : Jeanne Bretécher, présidente et co-fondatrice du SOGA, Frédéric Bardeau, président et co-fondateur de Simplon.co.
Pourquoi s’intéresser aux compétences tech ?
Tout d’abord, parce que Pro Bono Lab porte la conviction que “toute compétence est un bien public”, notion se retrouvant ainsi au cœur de ses différentes missions (opérateur social, média/plaidoyer, expérimentation & prospective). Aussi, les compétences numériques constituent des besoins de plus en plus présents chez les associations et autres structures à finalité sociale. C’était enfin l’occasion de partager en avant-première avec les Membres du Club l’étude sur les coopérations entre acteurs de l’utilité sociale et acteurs de la Tech, co-réalisée par l’Agence Phare et Pro Bono Lab, et commandée par le SOGA.
Le SOGA ou Social Good Accelerator
Co-fondatrice du “think and action tank” européen SOGA, Jeanne Bretécher a rappelé la genèse et les prochaines étapes du SOGA. Né lors du Web Summit de 2017 et pionnier dans sa volonté de mettre “more social good in tech, more tech in social good”, il rassemble aujourd’hui une cinquantaine de membres, majoritairement français et portugais. Il ambitionne d’informer, influencer et connecter les mondes de l’innovation sociale et de l’innovation technologique (Manifeste Pour un dispositif européen de co-innovation technologique et sociale). L’étude réalisée permet aujourd’hui de porter ce message de plaidoyer auprès des décideurs politiques et économiques européens.
Se basant sur ses résultats, la présidente du SOGA est ainsi revenue sur les importants besoins numériques des acteurs de l’utilité sociale : 91% des répondants des acteurs de l’utilité sociale déclarent souhaiter développer en interne plus de compétences tech tandis que 67% affirment avoir déjà collaboré avec des acteurs tech et souhaitent continuer à coopérer. Concernant les freins et les leviers des coopérations tech, 66% des répondants considèrent qu’il y a un manque de lieux de rencontre pour les acteurs de la Tech et ceux de l’utilité sociale tandis que 76% des répondants considèrent que les structures de l’utilité sociale ne connaissent pas suffisamment le potentiel de la technologie. Parmi les freins internes des structures de l’utilité sociale pour mener des coopérations avec les acteurs de la Tech, citons celui des fractures numériques ou celui du risque de dénaturer la qualité de l’impact social par une solution dématérialisée et déshumanisée.
“La compétence Tech, une compétence citoyenne.”
Véritable success story de l’ESS en France et dans le monde (84 écoles dans 18 pays, plus de 5600 apprenant.es depuis 2013), Simplon.co agit lui sur trois métiers : la formation aux compétences tech des populations éloignées de l’emploi, l’accompagnement de collaborateur.rices d’entreprise dont l’emploi est transformé par le numérique ou souffrant d’illectronisme, c’est-à-dire illétrisme numérique (Simplon Corp) et de l’emploi (Simplon Prod). A l’heure où 13 à 20 millions de personnes souffrent d’illectronisme, Frédéric Bardeau considère que “la compétence tech est une compétence citoyenne”. De la formation à la programmation initialement dispensée, la gamme des formations de Simplon.co s’est largement diversifiée : internet des objets, cybersécurité, data, etc.. L’importance d’autres types de compétences est aussi mise en avant comme les compétences transversales et les soft skills.
Dans ce projet, le pro bono se niche à plusieurs niveaux : mentorat inversé des jeunes simplonien.nes, organisation de hackathons, ateliers d’initiation au code, mécénat de compétences avec notamment la Fondation Simplon, participation à la structuration du pro bono pour la Tech (SOGA, FEST, etc.). Selon le co-fondateur de Simplon.co, le numérique est intrinsèquement lié à l’ESS avec un véritable enjeu d’attirer les talents tech dans les structures à finalité sociale. Ce fut l’occasion d’évoquer le projet d’accompagnement DigitESS que Simplon.co mène en partenariat avec AG2R LA MONDIALE pour la digitalisation du secteur de l’ESS.
Focus sur le mécénat de compétences
Dans l’étude sur les coopérations entre acteurs de l’utilité sociale et de la tech, on apprend que les effets de ces coopérations sont multiples : sur l’acquisition de compétences tech, sur le renforcement du modèle économique des structures d’utilité sociale et sur le renforcement de leur impact social. Concernant le mécénat de compétences, 77% des structures répondantes en ont déjà bénéficié ou souhaiteraient en bénéficier dans le cadre d’une coopération Tech.
L’étude a permis de souligner la nécessité d’opérer un véritable transfert de compétences et de s’assurer de leur internalisation pérenne chez les structures à finalité sociale, à la fin d’une coopération. 78% des structures d’utilité sociale ayant bénéficié d’une coopération tech ont augmenté leur impact social. Sur les conditions de mise en place de mécénat de compétences, il faudrait mettre en place une transmission durable de compétences, pour permettre un gain identifié pour l’autonomie de la structure accompagnée.
Au-delà de partager des lieux de rencontres et d’échanges, une compréhension commune des enjeux, des objectifs et des modalités de coopération « gagnant-gagnant » pour les deux parties est essentiel.
Les moments d’échanges entre les grands témoins et les participants au Probono Lunch ont permis de s’interroger sur l’articulation entre pro bono et compétences tech : la primordialité du diagnostic des besoins des structures à finalité sociale, l’injonction à l’innovation, la nécessité de sensibiliser et du lien avec les ODD, la question des outils, les effets de dépendance, la logique de transmission et de maximisation d’impact, etc.
En bref
Le bénévolat/mécénat de compétences est une porte d’entrée dans la relation partenariale entre acteurs de l’innovation sociale et de la tech, jouant un rôle dans la « démystification » de ce secteur. Formaliser un référentiel des compétences numériques nécessaires pour les structures à finalité sociale (proposition 14 du Manifeste pour le développement du pro bono) contribuerait à une collaboration pérenne de ces deux mondes. Il s’agit également de rappeler la nécessité du temps long pour le transfert de toute compétence, en particulier celui des compétences tech, en articulation avec la formation professionnelle. Enfin, réaffirmer que la tech ne peut pas tout. Qu’elle doit être un outil au service de l’utilité sociale.