L'actus
du Pro Bono
Redéfinir sa politique d’engagement des collaborateurs
Webinaire enregistré et diffusé pendant la période de confinement : avec Céline Laurichesse (Pro Bono Lab & Assemble), Alicia Izard (Entreprises pour la Cité) & Catherine Langlois (Crédit Agricole S.A.)
Manon Philippe
1 sept. 2020
Webinaire enregistré et diffusé pendant la période de confinement : avec Céline Laurichesse, présidente de Pro Bono Lab & cofondatrice d’Assemble, Alicia Izard, directrice Mécénat & investissement citoyen aux Entreprises pour la Cité & Catherine Langlois, responsable communication institutionnelle & mécénat au Crédit Agricole S.A.
Pour les plus privilégié.es d’entre nous en télétravail, cette période de confinement peut être propice à la prise de hauteur, synonyme de réflexion et de prise d’actions plus vertueuses. Penser l’urgence actuelle certes mais aussi l’après confinement, où les urgences n’en seront pas moins immenses. Une grande partie du défi actuel réside plus que jamais à résoudrer une équation devenue encore plus complexe : comment faire se rencontrer les besoins réels et bien identifiés des associations et autres structures à finalité sociale avec les envies et les possibilités d’engagement des volontaires, collaborateur.rices.
Les Entreprises pour la Cité est une association qui depuis 30 ans fédère un réseau d’entreprises ou fondations d’entreprises autour de l’innovation dans six régions en France. Derrière la terminologie d’«investissements citoyens » se nichent toutes les contributions volontaires des entreprises à l’intérêt général, au-delà du simple cadre législatif et juridique du mécénat, comme les marchés inclusifs, les joint ventures sociales, les contrats à impact social ou encore l’intrapreneuriat social. Administratrice du Filon, association qui vient en aide aux femmes sans abri, Alicia Izard a rappelé qu’un des objectifs de LepC objectifs est de rapprocher engagement et stratégie d’entreprise.
Forte de sa double casquette, Céline Laurichesse a rappelé qu’avant de définir toute stratégie d’engagement des collaborateurs, il était nécessaire de se poser un certain nombre de questions cruciales : pourquoi l’entreprise souhaite-elle engager ses collaborateurs ? A quels besoins doit-elle répondre, tant pour l’entreprise que ses collaborateurs sans oublier, évidemment, les associations ? Si une stratégie réussie apporte d’abord une réponse sérieuse à l’intérêt général, elle doit également répondre aux différents enjeux et objectifs de l’ensemble des parties prenantes (entreprise, collaborateurs et bénéficiaires). Une fois qu’ont été identifié leurs besoins grâce à des acteurs intermédiaires ou à des discussions avec des associations déjà partenaires, il s’agit de faire rencontrer ses besoins avec la typologie de collaborateurs mobilisables et des compétences disponibles dans l’entreprise tout en prenant en compte la durée et la temporalité d’engagement. Panel large de collaborateurs ou échantillon ? Bénévolat de compétences ou mécénat de compétences ? Compétences métiers spécifiques ou compétences transverses ? De ce cheminement découlent différentes modalités ou « formats d’engagement ». La communication interne joue un rôle clé dans le recrutement, la fidélisation et l’animation une communauté de collaborateurs engagés, tant par le choix des mots, que les témoignages post-mission.
Au moment de définir sa stratégie d’engagement, le Groupe Crédit Agricole S.A. avait justement pour préoccupation de prendre en compte les intérêts des associations et ceux des collaborateur.rices. Il a donc défini « une offre à la carte » répondant à l’envie de s’engager en interne sur une cause ou un format en en particulier. Concrètement, ce sont des programmes de tutorat avec Stop Illettrisme, des missions collectives d’une journée, idéales pour du team-building et renforcer le sentiment d’appartenance à un groupe, ou des journées pro bono chaque année plus nombreuses pour un accompagnement par les compétences. Catherine Langlois a également précisé qu’une attention particulière était apportée aux collaborateurs qui ne sont pas engagés à travers un travail de sensibilisation en interne sur des causes particulières pouvant déboucher sur des partenariats plus poussés avec certaines associations, comme Entourage. Un autre volet très important de cette consiste à apporter un soutien financier aux associations des collaborateur.rices du groupe via la constitution d’un jury chaque année pour décider d’une subvention, lien financier auquel vient très souvent s’ajouter des formats pro bono. Dans le contexte actuel, Catherine Langlois appelle à faire preuve de pragmatisme pour construire la sortie, en sachant rediriger l’envie d’engagement de ses équipes vers de nouvelles propositions d’engagement : en prenant contact avec les collaborateurs déjà engagés auprès d’associations, en partageant des ressources auprès de ces structures associatives vulnérables et en relayant des initiatives solidaires en interne comme le don du sang, l’envoi de tickets-restaurants au Samu social ou s’engager sur la réserve civique ou la proposition de s’engager financièrement sur le soutien décidé par le Groupe.
Face à une situation sans précédent pour le monde associatif (70% des associations ont vu une partie de leurs activités s’arrêter), Céline Laurichesse a partagé cette tribune de l’European Foundation Centre dans laquelle les fondations d’entreprises s’engagent à rester à l’écoute de leurs associations partenaires et de leurs besoins, en adaptant leurs activités, en se montrant flexibles sur les échéances notamment financières. Les associations sont confrontées à des problématiques d’urgence propres en matière de de ressources humaines par exemple (recours au chômage partiel, gestion des bénévoles) sans oublier la gestion de l’après auprès des conséquences sur leurs bénéficiaires.
Les membres du réseau LepC sont de tailles diverses et appartiennent à des champs d’activités vastes, certains devant pérenniser l’activité de l’entreprise avant de penser à l’engagement. D’autres se trouvent dans des situations plus favorables pour agir. Le Groupe VINCI a par exemple lancé une grande opération de 10 millions d’euros pour lutter contre le covid-19 tandis qu’Yves Rocher produit des gels hydroalcooliques et des masques. Plusieurs fondations d’entreprises commencent à s’interroger sur des missions en mécénat de compétences, notamment en présentiel.
Le contexte actuel est-il propice à une révision de la stratégie d’engagement ? Pour Céline Laurichesse, on fait face à un grand paradoxe entre la capacité démontrée à développer des formats alternatifs d’engagement pour que l’engagement perdure là où il est nécessaire, y compris de façon dématérialisée, et la nécessité accrue de solidarité de proximité et de se retrouver en présentiel au sortir de la crise. Réfléchir dès maintenant à l’après car la période de sortie de crise arrive s’annonce particulièrement difficile pour les réalités des entreprises et des associations, entre les disponibilités des collaborateurs et les besoins structurels des associations (définition du modèle économique, communication, besoin de bénévoles, etc.). Les enquêtes portées par des têtes de réseau comme le Mouvement associatif et son enquête en cours auprès des conséquences de la crise sur les associations françaises seront des ressources très précieuses pour les entreprises et les fondations d’entreprises pour réagir à ces besoins selon Alicia Izard.
A retenir :
S’appuyer sur l’existant tant au niveau partenarial qu’au niveau des initiatives et des outils ;
Le niveau d’action territoriale prend une importance encore plus particulière ;
La nécessité pour les entreprises de disposer de formats à distance dans ses offres d’engagement et « prêtes à l’emploi » ;
Lien vers le guide du pro bono !
Penser dès maintenant à l’après :
« Répondre à l’urgence crée l’opportunité de progresser sur le mécénat de compétences et d’instruire des dossiers de fond » Catherine Langlois ;
Faire preuve d’agilité en proposant des formats à distance et en présentiel.
Dounia El Aflahi, chargée de prospective et de projets à Pro Bono Lab